Tours Métropole a été choisie comme l’un des sites de l’atelier des territoires “Mieux aménager avec les sols vivants” en 2021/2022. Une démarche qui a eu le mérite de sensibiliser les différents acteurs à la préservation des sols dans l’aménagement et le développement urbain.
À Tours métropole, un atelier des territoires (ADT) a été organisé lors d’une session qui s’est déroulée en 2021-2022. Proposée par la DGALN (direction générale de l’aménagement, du logement et de la nature), cette démarche vise à sensibiliser les acteurs (politiques, techniques…) aux différentes problématiques liées à l’aménagement des sols. Aux enjeux écologiques, de biodiversité, mais aussi techniques ou encore culturels afin d’accompagner les territoires dans la définition d’une stratégie ou d’un projet d’aménagement. La thématique choisie – “Mieux aménager les sols vivants” – s’inscrit dans la droite ligne de l’objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) à l’horizon 2050, tel qu’énoncé par la loi Climat et Résilience du 22 août 2021.
Ces ateliers ont été l’occasion de réunir une cinquantaine de participants. Parmi eux, des élus de Tours Métropole Val de Loire (22 communes de la métropole de Tours) et de la Communauté de Communes Touraine-Est Vallées (10 communes situées en zone périurbaine, à l’est de l’agglomération Tourangelle), des techniciens territoriaux, des agences d’urbanismes, et aussi des promoteurs immobiliers et des universitaires. L’État a financé ces ateliers à hauteur de 100 000 euros, imposant une série de rencontres et la production d’un livrable final.
Deux territoires pour mieux comprendre les enjeux liés aux sols
Deux vastes territoires, de 5 à 6 000 ha chacun, identifiés au préalable par l’agence d’urbanisme de l’Agglomération de Tours (ATU 37) ont servi d’exemples pour aider à comprendre l’ensemble des enjeux liés à l’aménagement des sols. L’un situé sur la Varenne inondable où est construite notamment une grande zone d’activité avec un projet d’extension urbaine autour de l’aéroport. Le second site sur le Plateau agricole nord, avec un projet de développement à dominante économique autour de l’aéroport, un projet de développement logistique sur une autre commune et l’exemple d’un lotissement où le projet d’implantation d’un maraîcher, dans un projet d’aménagement, a été freiné par la vente des terres végétales. Ces deux secteurs n’ont pas été choisis au hasard : le SCoT de l’agglomération tourangelle et les Plans Locaux d’Urbanisme intercommunaux (PLUi) sont en cours d’élaboration. “Cela nous semblait être le moment opportun pour interroger la logique des sols dans le développement des territoires”, présente Arnold Landais, ex-chargé de mission pilote de l’ADT, au sein de la direction départementale des territoires d’Indre-et-Loire (DDT 37).
“Le premier secteur, très enclavé, avec des grands équipements, posait la question de la perméabilité des sols,poursuit Arnold Landais. L’idée était de savoir comment retrouver une certaine porosité sur ces espaces dans le cadre d’aménagements urbains. Le second site est un territoire sous pression en termes de développement urbain et foncier, avec une tendance à la conurbation avec le nord de Tours. Il permettait d’aborder des enjeux liés à la régulation du développement du foncier, et de s’interroger sur la façon de limiter l’impact sur les espaces agricoles et naturels”. “Ces territoires racontent la façon dont on maltraite les sols, résume Bénédicte Métais, chargée de mission autour de l’environnement à l’ATU 37. C’était l’occasion de parler des terres polluées, des zones inondables”.
Une feuille de route pour l’avenir
De ces ateliers a émergé un “livrable”, sorte de référentiel commun, produit par le cabinet d’expertise Acadie, visant à mieux prendre en compte les sols vivants dans l’aménagement du territoire. Pour essayer d’incarner ce principe des sols vivants, quatre dispositifs ont été définis, parmi lesquels : une “école des sols pour tous”, pour partager une culture commune des sols vivants. “L’idée était d’améliorer la connaissance théorique des sols avec une cartographie plus précise et surtout d’engager un programme de formation à destination des professionnels et des élus”, explique Arnold Landais.
Autre dispositif défini : l’élaboration d’une plateforme des terres pour l’agglomération tourangelle afin de valoriser la terre végétale. Sur un axe plus réglementaire, le livrable fait également mention d’une gouvernance pour renaturer les sites d’activités économique et commerciale. Il stipule qu’il convient d’inscrire les sols vivants dans la planification urbaine. Mais sur le terrain, l’application de ce document programmatique est apparue plus difficile à mettre en œuvre.
Mais un suivi à améliorer
En termes de suivi et de développement des projets dessinés, ce document n’a pas eu pour l’heure d’application directe et concrète. “Une programmation a été définie. Maintenant il manque un animateur pour fédérer les acteurs, mettre en œuvre, animer la démarche initiée”, estime Arnold Landais, qui travaille désormais pour l’agence d’urbanisme des territoires de l’Orléanais Topos. “Le nerf de la guerre des collectivités, c’est le financement, rappelle Fanny Maire, responsable de la transformation des espaces et du pilotage de plan local d’urbanisme (PLU) au sein de l’ATU 37. Il faudrait aussi mettre en place une gouvernance intercommunale et définir le pilotage. Pour la plateforme par exemple, ça bloque. Et personne ne s’occupe concrètement du projet pédagogique de l’école des sols. Il y a des actions sporadiques, mais pas d’action concertée”.
Pour Aude Talon, directrice de l’aménagement, de l’urbanisme et du foncier pour Tours au sein de la Métropole Val de Loire, “les deux secteurs identifiés ont principalement servi de support à des visites et des réflexions, mais ils n’ont pas véritablement été utilisés comme terrains d’application dans le temps imparti de l’atelier. Néanmoins, cela nous a permis d’échanger avec un nombre d’acteurs plus large et d’accroître notre connaissance des sols vivants, tout en mettant ce sujet davantage en avant, ce qui n’était pas le cas auparavant”.
Un effet levier plus indirect
Néanmoins, “les mots “sols vivants”, “qualité des sols” reviennent aujourd’hui dans les discours de certains élus de Tours Métropole”,constate Myriam Rebiai, cheffe de service d’urbanisme et démarches de territoires au sein de la DDT d’Indre-et-Loire. Ainsi, ces ateliers ont permis de sensibiliser les acteurs du territoire à la préservation des sols, impulsant une dynamique qui se traduit aujourd’hui dans divers autres projets.
Au titre du fonds vert de 2023, la ville de Tours est engagée par exemple dans un chantier de réaménagement et de renaturation des cours d’école. Dans le secteur inondable de la Varenne, où se trouve la gare voyageurs de Saint-Pierre-des-Corps, l’État a accordé 400 000 euros de subventions pour un chantier de renaturation du parvis nord de la gare. Par ailleurs, la métropole a obtenu des fonds en début d’année 2024 (75 000 €) pour améliorer une zone commerciale au nord-est de Tours dans le cadre du plan national de transformation des zones commerciales.“Une sensibilisation aux enjeux des sols vivants est désormais acquise, en premier lieu auprès des élus”, estime également Aude Talon. La prise en compte de la dimension du sous-sol dans le projet de PLU métropolitain actuel est désormais une priorité”.
En collaboration avec la Plateforme d’observation des projets et stratégies urbaines (POPSU), qui croise les savoirs scientifiques et l’expertise opérationnelle pour mieux comprendre les enjeux et les évolutions associés aux villes et aux territoires, la métropole de Tours souhaite se doter d’outils réglementaires valorisant les fonctions du sol concomitamment à l’élaboration du PLU intercommunal. Il s’agira également de décliner en urbanisme opérationnel la notion de “trame brune”, qui comprend par exemple la composante pédologique des milieux et l’identification des courants d’eau souterrains. Ces ateliers auront donc eu le mérite de sensibiliser les acteurs du développement du territoire à la préservation des sols, un enjeu écologique clef.■
Clémentine Perrin
OpenEdition vous propose de citer ce billet de la manière suivante :
Revue d'urbanisme Diagonal (24 avril 2024). L’Atelier des territoires, une autre façon de sensibiliser les acteurs locaux à l’aménagement des sols. Revue Diagonal. Consulté le 18 janvier 2025 à l’adresse https://doi.org/10.58079/w9n0